Arrêt d’un antidépresseur

1- Risque de syndrome de sevrage

Symptomatologie

Arrêter un antidépresseur brutalement provoque très souvent, dans les jours qui suivent, des manifestations pénibles :

  • Générales : maux de tête, courbatures, fatigue, sueurs, tremblements, palpitations, nausées, douleurs abdominales, perte d’appétit
  • Neuro-sensorielles : sensations vertigineuses, sensations de brûlure ou de courant électrique, acouphènes (bruit dans les oreilles), troubles visuels
  • Psychiques : troubles du sommeil, anxiété, attaques de panique, impulsivité agressivité, idées suicidaires

Ces symptômes sont liés à un syndrome de sevrage. Ils peuvent être pris à tort pour une rechute anxieuse et dépressive. Contrairement à une rechute, ils disparaissent en quelques jours si l’on reprend le traitement .

Ces symptômes s’atténuent en général assez rapidement mais ils peuvent durer plusieurs semaines. Une étude sur 580 patients gênés par un syndrome de sevrage des antidépresseurs a montré une persistance des symptômes pendant au moins deux mois chez 85% d’entre eux.

Facteurs de risque de syndrome de sevrage

Le risque de syndrome de sevrage est d’autant plus important que :

  • le traitement a été long
  • le traitement a comporté de fortes doses
  • l’antidépresseur a une demi-vie (temps pour en éliminer la moitié) courte. Les antidépresseurs aux demi-vie les plus courtes, et donc les plus à risque de syndrome de sevrage, sont :
    • Paroxétine – Déroxat (1/2 vie de 24h00)
    • Venlafaxine – Effexor (1/2 vie de 5h00 pour la Venlafaxine et de 11h00 pour son métabolite actif (O-Desméthylvenlafaxine)
    • Duloxétine – Cymbalta (1/2 vie de 12h00)
    • (Une exception : la SERTRALINE a une demi-vie de 26h00 mais pose pourtant moins de problèmes de sevrage que bien d’autres antidépresseurs)

Précautions à prendre pour éviter le syndrome de sevrage

  • Avant le début du traitement, il est préférable d’éviter les antidépresseurs sus-cités, sauf nécessité. La Paroxétine peut être utile en second recours dans les troubles anxieux (mais à éviter en première intention à cause de ce risque de sevrage et aussi à cause de ses effets anticholinergiques). La Venlafaxine peut être une ressource après l’échec des IRS tant dans la dépression que dans les troubles anxieux mais à condition de surveiller particulièrement la Tension Artérielle et le cœur.
  • Il est important de prévenir le patient, dès le début du traitement, de ne pas arrêter brutalement son traitement, de limiter autant que possible la durée du traitement. Il faut également prévoir d’emblée les modalités d’arrêt.
  • L’arrêt doit se faire au minimum en 4 semaines, mais il est préférable de l’étaler sur plusieurs mois. Par exemple, pour arrêter un traitement par 2 gélules (gél) de Venlafaxine 75 mg :
    • Quinze jours : alterner un jour 2 gél à 75 mg, le lendemain, 1 gél à 75 mg + 1 gél à 37,5 mg
    • Quinze jours : prendre tous les jours 1 gél à 75 mg + 1 gél à 37,5 mg
    • Quinze jours : alterner un jour  1 gél à 75 mg + 1 gél à 37,5 mg, le lendemain 1 gél à 75 mg
    • Quinze jours : prendre tous les jours 1 gél à 75 mg
    • Quinze jours : alterner un jour 1 gél à 75 mg, le lendemain 1 gél à 37,5 mg
    • Quinze jours : prendre tous les jours 1 gél à 37,5 mg
    • Quinze jours : alterner un jour 1 gél de 37,5 mg, le lendemain 0 mg
    • Quinze jours : prendre 1 gél de 37,5 mg tous les trois jours. La dernière phase est à adapter par le patient lui-même. Si des maux de têtes, des nausées, ou d’autres symptômes apparaissent, il faut reprendre une gélule, voir revenir au pallier précédent.
  • Les formes buvables, lorsqu’elles existent, peuvent rendre service. Mais ATTENTION : les formes buvables de CITALOPRAM ont une biodisponibilité supérieure d’environ 25% à celle des comprimés : la prise de la même quantité sous forme buvable que sous forme de comprimés conduit en fait à augmenter la dose de CITALOPRAM ! (Source : Prescrire, avril 2021, p.289)

2- Risque d’interactions

Les antidépresseurs IRS inhibent certaines enzymes hépatiques (cytochrome P 450) dégradant d’autres médicaments.

Par exemple, la PAROXÉTINE inhibe assez fortement l’isoenzyme 2D6 (la VENLAFAXINE, la DULOXÉTINE et la SERTRALINE l’inhibent plus faiblement). L’inhibition de cette isoenzyme peut entraîner l’augmentation des concentrations plasmatiques des médicaments associés métabolisés par elle. Ces médicaments comprennent certains antidépresseurs tricycliques (clomipramine, nortriptyline et désipramine), les neuroleptiques de type phénothiazine (ex : perphénazine et thioridazine), la rispéridone, l’atomoxétine, certains antiarythmiques de type 1c (ex : propafénone et flécaïnide) et le métoprolol.

Il importe de vérifier précisément les éventuels risques de diminution du taux sanguin des anticoagulants, des antiépileptiques et des contraceptifs associés lors de la diminution d’un antidépresseurs.

 

Il faut également anticiper la disparition d’effets antagonistes avec certains médicaments. Par exemple, les antidépresseurs peuvent faire baisser la tension artérielle. Si le patient est hypertendu, il faudra réévaluer son traitement anti-hypertenseur et, peut-être, l’augmenter.