Colopathie Fonctionnelle

(Syndrome de l’Intestin Irritable (SII), Irittable Bowel Syndrom (IBS))

Généralités

* La « colopathie fonctionnelle » regroupe les symptômes suivants : Douleur abdominale ; Ballonnements abdominaux, Gaz ; Constipation ou alternance diarrhée/constipation

* Ces symptômes peuvent correspondre à d’autres pathologies digestives, éventuellement graves. Il faut, dans un premier temps, rechercher des signes d’alerte de ces pathologies et faire des examens appropriés le cas échéant :

  • Faire une coloscopie si :
    • sang dans les selles
    • antécédents familiaux de cancer colo-rectal
    • survenue soudaine de ces symptômes, surtout après 50 ans
    • perte de poids involontaire
  • Faire une gastro-dudoénoscopie et un dosage d’IgA trans-glutaminases à la recherche de maladie cœliaque si
    • stéatorrhée (selles graisseuses (signe de malabsorption des graisses)
    • malabsorption (carence en fer, calcium, magnésium, zinc, vitamines A,D,E,K…)
    • fatigue, amaigrissement, pâleur,…
    • association à d’autres maladies auto-immunes
  • Faire une corpoculture (mise en culture des selles) et éventuellement une coloscopie si :
    • association à de la fièvre et apparition des signes après un voyage dans un pays tropical

Le diagnostic de colopathie fonctionnelle ne doit pas être posé avant d’avoir éliminé d’autres diagnostic, notamment celui de Maladie Cœliaque.

* La colopathie fonctionnelle n’est pas grave au sens où elle ne correspond pas à des lésions (comme son nom l’indique elle correspond à un dysfonctionnement) mais elle altère sérieusement la qualité de vie.

La colopathie fonctionnelle est très fréquente chez les personnes souffrants de troubles psychiatriques quels qu’ils soient (notamment en raison du retentissement du stress sur le tube digestif (voir ci-dessous)). Elle génère à son tour fatigue, anxiété, et amplifie la dépression. Chez les personnes au passé de souffrance psychique, le système digestif acquiert souvent une fragilité durable. Les mesures pour prévenir les causes de colopathie (ci-après) doivent être mises en œuvre en permanence. Malgré cela, il n’est pas rare que les symptômes réapparaissent de temps en temps. Il faut alors rapidement mettre en œuvre les autres moyens indiqués plus loins (traitements symptomatiques).

Causes :

On distingue principalement six causes, le plus souvent associées les unes aux autres. Les trois premières sont quasi-systématiques, les trois autres caractérisent les colopathies plus sévères.

  • Stress :
    • Le stress chronique perturbe la digestion mécaniquement (repas pris à la hâte, en étant stressé ; nourriture de mauvaise qualité) et en diminuant toutes les sécrétions digestives (acide chlorhydrique de l’estomac, bile, enzymes digestifs).
    • Le stress dérègle également la flore intestinale en diminuant les populations saccharolytiques (Lactobactéries,…) et favorise la dysbiose.
  • Mauvaise digestion
  • Excès d’aliments irritants
  • Dérèglement de la flore intestinale (dysbiose)
  • Intolérances alimentaires
  • Excès d’aliments fermentables

Traitements de fond : agir sur les causes, de manière hiérarchisée

Le traitement doit toujours commencer par les trois premières causes. Leur traitement, mis en œuvre précisément, peut être suffisant.

GÉRER LE STRESS :

  • Essayer d’aborder le repas en ayant fait quelques exercices de relaxation avant, comme la cohérence cardiaque, ou même simplement trois respirations conscientes
  • Manger au calme
  • Ne pas se « précipiter » sur son assiette

FACILITER LA DIGESTION :

  • Manger à heures régulières ; faire des petits repas, quatre à cinq fois par jour si besoin
  • Manger lentement
  • MASTIQUER consciencieusement ; poser sa fourchette après chaque bouchée; mastiquer 20 fois / bouchée…
  • En cas de douleur, ballonnements,… : faire une pause jusqu’au retour du confort digestif (ne pas continuer à manger en cas de douleur abdominale, même légère)
  • Manger des fibres (mais pas en excès)
  • En fin de repas (ou au cours du repas), en cas de pesanteur gastrique ou de difficultés à digérer, prendre du vinaigre de cidre (1 cuillère à soupe dans un verre d’eau)
  • Prendre systématiquement une infusion après le repas (menthe poivrée, camomille, verveine, anis étoilé,…)
  • Si ces mesures ne suffisent pas : prendre des enzymes digestifs au cours du repas
  • Avoir une bonne hygiène de vie générale, notamment faire de l’exercice physique, faire régulièrement des exercices de relaxation ; Éviter le tabac et les chewing-gums

ÉVITER LES ALIMENTS IRRITANTS

  • Alcool
  • Épices
  • Poivre ; Gingembre
  • Chocolat
  • Agrumes, jus d’agrumes
  • Eau gazeuse
  • Thé, café
  • etc.

 

Si ces mesures ne suffisent pas, il faut mettre en place le traitement des autres causes au cas par cas, mais en maintenant scrupuleusement les mesures de gestion du stress et de facilitation de la digestion ainsi que l’éradication des aliments irritants.

 

TRAITER LA DYSBIOSE COLIQUE :

Voir ici

À noter : Selon une étude, la colopathie fonctionnelle est associée dans 37% des cas à un déséquilibre sérieux de la flore de l’intestin grêle, la Prolifération Bactérienne du grêle (Small Intestin Bacterial Overgroth : SIBO). Il faut donc rechercher une Prolifération Bactérienne du grêle si la colopathie fonctionnelle n’évolue pas favorablement, si les signes apparaissent la nuit, si elle est associée à des signes de gastroparésie ou à des signes de malabsorption. Si les mesures ci-dessus ne suffisent pas, ou si d’emblée des signes orientent vers une prolifération bactérienne du grêle, le traitement est celui de cette prolifération.

 

TRAITER LES ÉVENTUELLES INTOLÉRANCES ALIMENTAIRES

Les laitages et le gluten (présent dans le blé, le seigle, l’orge) sont les plus souvent en cause. Un essai de Régime  sans gluten mérite d’être essayé.

La recherche d’autres intolérances alimentaires relève de suivis spécialisés (à envisager uniquement si la mise en œuvre précise et constante des mesures ci-dessus a échoué).

 

ÉVITER LES « FODMAPS »

Les FODMAPS (Fermentable Oligo, Di, Mono And Polyols) sont des sucres (oligo, di et monosaccharides) et des alcools (polyols) issus des sucres. Ils sont peu absorbés dans l’intention grêle et peuvent avoir un effet osmotique, par ailleurs ils fermentent en produisant de l’hydrogène. Ces deux mécanismes entraînent une distension du grêle distal et du colon proximal.

Voici les principales sources de FODMAP :

FODMAP Sources alimentaires les plus riches
Oligosaccharides Fructo-oligosaccharides (FOS) (fructanes) blé, seigle, oignons, ail, artichauts
Oligosaccharides Galacto-oligosaccharides (GOS) légumineuses
Disaccharides lactose lait
Monosaccharides glucose, fructose miel, pommes, poires, melon d’eau, mangues
Polyols sorbitol pommes, poires, fruits à noyau, menthes et certaines confiseries sans sucre
Polyols mannitol champignons, chou-fleur, menthes et certaines confiseries sans sucre

Certains légumes et fruits semblent exempts de FODMAPs : pommes de terre, courges, blettes, carottes, courgettes, tomates,… ; bananes, raisins,…

Le régime consiste à supprimer les sources de FODMPAs pendant plusieurs semaines, jusqu’à disparition des symptômes de colopathie fonctionnelle, puis à les réintroduire graduellement jusqu’au seuil de tolérance.

Mais attention ! :

  • Les aliments sources de FODMAPS sont également sources de fibres, indispensables pour nourrir les cellules du colon et pour nourrir la flore intestinale. Ils sont également notre principale source de vitamines et de potassium. les légumineuses sont, en plus, une source de protéines indispensable aux personnes végétariennes ou qui ont régime peu carné.
  • Mettre en place ce régime n’a de sens qu’après échec des mesures ci-dessus, suivies strictement
  • Ce régime n’a aucun effet sur la constipation et a même tendance à l’aggraver
  • Les conseils concernant ce régime sont souvent inadéquats (par exemple, il est parfois recommandé de consommer des épices, du gingembre, des oranges, des citrons au motif qu’ils n’apportent pas de FODMAPs, alors qu’ils peuvent être irritants). Ce régime peut être pertinent et efficace mais à condition de le mettre en place en dernier ressort et en maintenant les autres mesures.

 

Traitements symptomatiques :

° Constipation : boire 1,5l ; Répondre au besoin d’aller à la selle dès qu’il se présente ; Exonérer accroupi (un tabouret sous les pieds). Éventuellement : Fibres solubles : préparations à base d’Ispaghul (Psyllium blong), p.exSpagulax (contre-indiqués en cas de sténose digestive, maladie inflammatoire, mégacôlon, paralysie de l’intestin, diabète, difficultés de déglutition (car ils doivent être associés à la prise d’une grande quantité d’eau) ;

° Diarrhées ou gaz, flatulence, douleurs (souvent liées aux gaz) : Charbon (Formocarbine 1 càc ou Charbon Actif Beloc 125 mg 2 capsules) à jeun et au coucher (à prendre à distance de 2h00 des autres médicaments ; contre-indiqué en cas de grossesse ; arrêter si constipation ; arrêter dès le soulagement des symptômes)

° Diarrhée seule : Saccharomyces Boulardii 250mg : 1 gél matin et soir (sauf immunodépression)

° Douleurs, lourdeur après les repas, ballonnements gênants : cuillère à soupe de Vinaigre de Cidre dans un verre d’eau en cours ou après le repas, ou Bicarbonate de sodium : 1/2 cuillère à café dans un verre d’eau, après le repas, et Enzymes digestifs

° Spasmes : Huile essentielle de menthe poivrée ; si colopathie sévère : Dicetel (Pinavérium) (sur ordonnance) 1 cp matin et soir en cas de début de crise de colopathie fonctionnelle, jusqu’à disparition totale des symptômes ; prendre les comprimés avec un verre d’eau, debout, à distance du coucher

Certains patients peuvent être soulagés par Gelsectan, spécialité en vente libre, à base de cellulose, d’extrait de pépins de pamplemousse et de protéines de pois.

 

Médicaments à éviter, peu efficaces et/ou dangereux :

  • La Trimebutine (Débridat,…) et le Phloroglucinol (Spasfon) n’ont pas d’efficacité démontrée sur la colopathie fonctionnelle au-delà de l’effet placebo, alors qu’ils exposent à de rares réactions allergiques graves (dont des syndrome de Lyell pour le Phloroglucinol). La Trimebutine expose à des dépendances.
  • Les anti-diarrhéiques n’ont aucun effet sur la douleur ni sur l’inconfort digestif. Ils exposent à des constipations. Le Lopéramide (Imodium), un agoniste de certains récepteurs opioïdes, à fortes doses expose à des rétentions urinaires et des troubles du rythme cardiaque (intervalle QT allongé). Le Racécatodril (Tiorfan), un anti-sécrétoire, a un effet modeste sur les diarrhées, sans effet démontré sur la douleur, ni sur l’inconfort intestinal. Il expose à des maux de tête et des angiœdèmes (gonflement de tissus sous la peau, pouvant toucher le visage et la gorge, le tube digestif, les voies respiratoires ; Les antihistaminiques parviennent à soulager les symptômes légers, mais si l’angiœdème rend la déglutition ou la respiration difficile, un traitement d’urgence rapide est nécessaire). ces angiœdèmes se produisent surtout en cas d’association avec un Inhibiteur de l’Enzyme de Conversion (médicaments contre l’hypertension artérielle).
  • L’Éluxadoline (Truberzi), un nouvel anti-diarrhéique, expose à des pancréatites.
  • Les argiles, comme la Diosmectite (Smecta), l’Attapulgite (Actapulgite), l’Hydrotalcite (Rennieliquo), la Montmorillonite Beidellitique (Bedellix, Gelox) et le Kaolin (Gastropax, Neutroses) sont polluées au plomb qui a des effets toxiques neurologiques, hématologiques, rénaux et cardio-vasculaires et qui est reprotoxique, quelle que soit la dose. Les argiles modifient l’aspect des selles sans agir sur les pertes liquidiennes et le risque de déshydratation.
  • Le Nifuroxazide (Ercéfuryl, Panfurex,..) est peu efficace et expose à des réactions allergiques graves et des agranulocytoses. Il est censé avoir été retiré du marché.