Végétarisme

Être végétarien expose à des carences qui, même minimes, peuvent provoquer une dépression ou aggraver des troubles de l’humeur, un TDAH,…

Pour s’en rendre compte, il suffit de comparer les Besoins Nutritionnels Moyens des principaux nutriments (grâce au site dédié de l’anses) aux compositions nutritionnelles des aliments ovo-lacto-végétariens (grâce aux indications de la Table « Ciqual » , du Centre d’Information sur la Qualité des Aliments de l’Anses).

Pour certains nutriments, les carences peuvent être prévenues par des mesures rigoureuses. Pour d’autres nutriments, il est extrêmement difficile d’éviter les carences et il peut être nécessaire de prendre une supplémentation.

Un bilan sanguin au bout de quelques mois de régime végétarien est bienvenu pour évaluer les éventuelles carences (en sachant que la carence en vitamine B12 n’est visible sur le bilan sanguin qu’au bout de 2-3 années et que la carence en magnésium n’est visible qu’en cas extrême (seul 1% du stock total de magnésium circule dans le sang)).

I)  Pour certains nutriments, le Besoin Nutritionnel Moyen peut être atteint moyennant certaines mesures :

* Les Protéines  :

Quantitativement, le Besoin Nutritionnel Moyen en protéines est de 0,66g/kg/j pour les adultes et 0,8g/kg/j pour les plus de 65 ans (ici)). Ces objectifs sont accessibles pour les végétariens grâce aux légumineuses, œufs, fromages, noix et graines, à condition d’en manger des quantités suffisantes (voir un résumé des compositions ici).

Qualitativement, il est nécessaire d’avoir en quantité suffisante les 9 acides aminés (AA) dits « essentiels », que le corps humain ne sait pas synthétiser (3 AA « branchés » : Leucine, Isoleucine, Valine ; 2 précurseurs de neuromédiateurs : Tryptophane, Phénylalanine (précurseur de la Tyrosine) ; Lysine ; Méthionine ; Thréonine ; + Histidine que l’enfant ne sait pas fabriquer et que l’adulte fabrique en quantité insuffisante). En effet, s’il manque un des ces acides aminés, la synthèse des protéines le contenant ne peut plus se poursuivre.

Ces AA essentiels se trouvent tous dans les œufs. Mais ils ne sont pas tous présentes dans les produits végétaux. On peut les obtenir en associant céréales et légumineuses. En effet,  les céréales manquent de Lysine et les légumineuses manquent de Méthionine. Le maïs manque de Tryptophane.

Par ailleurs, des mesures sont très utiles pour utiliser au mieux les protéines :

• Éviter d’utiliser ses protéines (des muscles, du foie, du tissus digestif,…) pour produire de l’énergie. Pour cela : prendre des glucides pendant et après l’exercice physique, bien s’hydrater pendant et après l’exercice physique, développer progressivement l’entraînement musculaire et avoir un bon niveau d’anti-oxydants (les acides aminés oxydés ne peuvent plus être utilisés pour fabriquer des protéines et sont éliminés)

• Favoriser l’orientation des protéines alimentaires vers la synthèse de nos propres protéines, plutôt que vers la production d’énergie ou leur élimination. Pour cela :

  • manger toutes les protéines de la journée au cours du repas de midi et sous forme de protéines « rapides », facilement décomposables en acides aminés (intérêt des légumineuses bien cuites et moulinées en purées).
  • manger pendant ce même repas des glucides et lipides pour déclencher encore plus de sécrétion d’insuline (qui stimule la synthèse de nos protéines). (Le fait de réaliser ce repas abondant à midi peut être favorisé par le jeûne intermittent, notamment en ne prenant pas de petit-déjeuner  si cela est possible.)
  • déjeuner après avoir fait de l’exercice physique (au décours de celui-ci la synthèse des protéines musculaires se met en route). (cf ici et les écrits du Pr Boirie)
  • veiller à ne pas être carencé en zinc (voir infra)

À noter : le premier signe de carence en protéines est la fatigue et la dépression.

 

* Le Fer  : Le Besoin Nutritionnel Moyen est de 6mg/jr pour les hommes, 7mg/j pour les femmes. On en trouve dans les légumineuses (2mg pour 100g de pois cassés cuits, 1,3mg pour 100g de pois chiches cuits, 1,7mg pour 100g de haricots blancs cuits,), dans les légumes verts (1,3mg pour 100g d’épinards cuits), dans les graines (4,1mg pour 100mg de pistaches grillées, 3mg pour 100mg d’amandes avec peau, 1mg pour 100mg de cacahuètes), dans les jaunes d’œufs (0,95 mg/100g de jaune d’œuf cuit *). Le fer est mieux absorbé si l’on prend de la vitamine C en même temps.

 

* Le Calcium : Le Besoin Nutritionnel Moyen est de 750 mg/J. On en trouve dans les produits laitiers (898mg/100g d’emmental), les légumineuses (72 mg/100g de pois chiches cuits, 27,7mg/100g de pois cassés cuits), les fruits à coque (260mg/100g d’amandes avec peau, 120mg/100g de noisettes), les produits céréaliers (39mg/100g de pain complet, 13mg/100g de riz complet cuit), certains légumes feuilles ( 240mg/100g d’épinards cuits ; 56mg/100g de blettes cuites ; 32mg/100g de choux à pomme cuit), les figues (167mg/100g de figues sèches), certaines eaux riches en calcium. À noter : le fait de ne pas manger de viande rouge évite l’élimination du calcium par le biais de l’acidification lié à l’excès d’azote ; l’exercice physique permet une meilleure utilisation du calcium.

 

* Le Magnésium : Le Besoin Nutritionnel Moyen est environ de 400mg/jr pour les hommes, 300mg/j pour les femmes. Le magnésium est impliqué dans plus de trois cent systèmes enzymatiques, contribuant notamment à la production d’énergie, au bon fonctionnement des muscles, au métabolisme du calcium. Les principales sources de magnésium, hormis les fruits de mer, sont les oléagineux (270mg/100g dans les amandes, 190 mg/100g dans les arachides, 160 mg/100g dans les noisettes), le chocolat (109mg/100g), les céréales complètes (51mg/100g dans le pain complet, 49mg/100g dans le riz complet cuit), le fromage (48,9mg/100g dans l’emmental) ainsi que dans certaines eaux minérales (4mg/100g dans une eau minérale ‘moyenne’).

En situation normale, le régime végétarien peut tendre à couvrir le Besoin Nutritionnel Moyen mais en cas d’anxiété, de dépression ou d’autre trouble psychique, il faut prendre une supplémentation.

 

La Vitamine A regroupe :

  • le rétinol, forme active et qui n’est présente que que dans les produits animaux, les huiles de foies de poisson et les foies d’animaux (qui en sont extrêmement riches), le jaune d’œuf et les caroténoïdes, présents dans les légumes surtout orangés (carotte, citrouilles, melon, mangue)
  • et les légumes à feuilles vertes. Le carotène doit se transformer en Rétinol ; il faut 6 Béta-carotène pour produire 1 Rétinol.

Le rétinol est indispensable à l’expression de notre génome, à l’immunité et à la vision diurne et nocturne.

Le Besoin Nutritionnel Moyen, exprimé en équivalent rétinol est de 580mcg pour un homme et 490 pour une femme.

Le jaune d’œuf apporte 263mcg/100g de rétinol et 106mcg/100g de béta-carotène, soit au total 280 mcg de rétinol/100g.

Les carottes cuites à l’eau apportent 8470 mcg de béta-carotène pour 100g, soit 1411 équivalent rétinol. La citrouille apporte 3100 mcg de béta-carotène pour 100g, les épinards cuits 6680 mcg de béta-carotène pour 100g.

À noter : la supplémentation en vitamine A est potentiellement tératogène (entraîne des malformations chez le fœtus).

 

Les vitamines B sauf la vitamine B12. En plus d’être présentes dans les produits animaux, elles sont également présentes en bonne quantité dans les produits végétaux et les œufs :

Vitamine B1 (Thiamine) : produits céréaliers complets et oléagineux ; (son absorption est empêchée par l’alcool)

Vitamine B2 (Riboflavine) : produits laitiers et œufs

Vitamine B3 (PP ou Niacine (acide nicotinique et nicotinamide)) : céréales complètes

Vitamine B5 (Acide pantothénique) : céréales complètes, produits laitiers

Vitamine B6 (Piridoxine) : céréales complètes, légumes amylacés (pommes de terre, céréales, légumineuses) , produits dérivés du soja, fruits non-agrumes

Vitamine B8 (Biotine) : œufs, fromage

Vitamine B9 (Acide folique) : légumes à feuilles, légumineuses ; levure de bière, germe de blé.

 

* La vitamine E (Tocophérol) : Sa rôle est fondamemtalement anti-oxydant. Les Apports recommandés sont de 10mg/j pour les hommes et 9mg/j pour les femmes. Les sources alimentaires sont les huiles végétales (148mg/100g d’huile de germe de blé ; 57,3 mg/100g d’huile de Tournesol, 22,3mg/100g d’huile d’olive vierge extra), certains fruits à coque (27,3 mg/100g d’amandes avec peau).

 

II) Pour d’autres nutriments essentiels, le Besoin Nutritionnel Moyen est difficile à atteindre et peut nécessiter une supplémentation :

 

* La Vitamine B12 (Cobalamine) n’est présente que dans les produits animaux, dont les œufs et les produits laitiers. Notre réserve hépatique (dans le foie) est suffisante pour 2 à 3 ans. Les troubles liés à une carence en vitamine B12 (fatigue, dépression, anémie, atteinte des nerfs périphériques, atteinte cérébrale central, tableau démentiel) peuvent n’apparaître qu’après trois ans de végétarisme.

Les apports recommandés sont de 4 mcg/j chez l’adulte. Le jaune d’œuf cuit en apporte 2,43 mcg/100g, le yaourt 0,24mcg/100g, le camembert 1,13mcg/100g, l’emmental 1,5 mcg/100g.

Une supplémentation en vitamine B12 est nécessaire. Il apparaît prudent de prendre une ampoule de 1000 microgrammes une fois par mois pour une personne consommant beaucoup d’œuf et trios fois par mois dans le cas contraire. Un contrôle sanguin est nécessaire pour vérifier que la supplémentation est suffisante (en sachant que l’évaluation est biaisée avant deux-trois ans de régime végétarien).

 

* Les Omégas 3 sont présents dans les poissons gras et les produits animaux Bleu-Blanc-Cœur.

L’ oméga 3 présent dans les végétaux, comme les graines de lin et l’huile de Colza, est uniquement le précurseur (acide alpha-linoléique) dont nous transformons seulement 6% en EPA et 1% en DHA, les deux omégas 3 actifs. On ne peut couvrir les besoins en omégas 3 uniquement avec des produits végétaux. Il faut prendre des suppléments, si l’on veut des suppléments non issus de poissons (plus riches en DHA et moins en EPA), on peut prendre par exemple 1 gélule TESTA Omégas 3 chaque jour (omégas 3 synthétisés par des algues).

 

* La Vitamine D n’est présente que dans les poissons gras (elle est également synthétisée par la peau, mais de manière peu efficace). Apporter au minimum une supplémentation de 5mcg (200UI) par jour (AJR selon l’anses), 25mcg/j (1000UI) pour les 51-70 ans selon l’Académie de Médecine.

 

*L’Iode n’est présent que dans les poissons, un peu les laitages, le sel de table supplémenté (s’il ne s’est pas évaporé). Faire un contrôle en mesurant l’iode sur urines de 24h00, appelé « iodurie des 24h00 » (28-30€ non remboursés mais sans ordonnance). Un apport alimentaire suffisant en iode se traduit par une excrétion de 100 mg/l sur 24h00. Si ce n’est pas le cas, il peut être judicieux d’apporter une supplémentation adaptée (par exemple : si l’iodure est à 50mg/L, cela indique un manque de la moitié des apports en iode ; ceux-ci étant de 150mcg/J, on peut prendre une ampoule de 150mcg d’iode un jour sur deux).

 

* Le Sélénium, co-facteur notamment pour la synthèse des hormones thyroïdiennes, se trouve principalement dans les poissons  et les crustacés. Les apports quotidiens souhaités sont de 70mcg/j. On en trouve dans les œufs (7,68mcg/100g), dans certains oléagineux (103 mcg/100g de Noix du Brésil ; 4,7mcg/100g de pistaches).

 

* Le Zinc intervient dans l’activité de plus de 200 enzymes, notamment celles qui participent à la protection contre les radicaux libres et celles qui sont impliquées dans la synthèse protéique (d’où son importance dans les phénomènes de renouvellement des cellules notamment musculaires, de cicatrisation et d’immunité). Le Besoin Nutritionnel Moyen en zinc est de 9mg pour les hommes et 7mg pour les femmes. Les phytates, présents dans les céréales et les légumineuses diminuent l’absorption du zinc. Il est donc très important de les faire cuire dans un grand volume d’eau, de jeter cette eau à la moitié de la cuisson et de la remplacer. Le zinc est présent surtout dans les viandes et les poissons. On en trouve également dans les fromages (2,5mg pour 100g de camembert *, 1,83 mg pour 100g de Roquefort), le jaune d’œuf (1,4 mg pour 100g de jaune d’œuf cuit}, les légumineuses (p.ex 1,1 mg pour 100g de pois chiches cuits), les légumes (0,8mg pour 100g d’épinards cuits, 0,23mg pour 100g dans les pommes de terre cuites à l’eau), les fruits secs (0,61mg pour 100g de bananes sèches, 0,51mg pour 100g de figues séchées). En cas de doute, on peut réaliser une analyse sanguine pour identifier une carence en zinc. Il n’y a pas d’inconvénients à prendre 2 à 4 doses 15 mg  par semaine si l’on ressent des signes potentiellement en lien avec une carence en zinc (altération des cheveux et des ongles, infections ORL  à répétition, problèmes cutanées).

 

Une algue, la Spiruline peut être intéressante pour les végétariens mais avec les mises en gardes suivantes :

  • Si la spiruline n’est pas cultivée dans l’eau de mer, elle ne contient pas d’iode. Si elle est cultivée dans l’eau de mer, sa teneur en iode n’est pas standardisée, avec un risque de surdosage ; par ailleurs, elle peut contenir des polluants.
  • La spiruline est une bonne source de vitamine A
  •  La spiruline contient beaucoup de fer (au minimum 6mg pour 10g, soit le besoin nutritionnel moyen).
  • Sa teneur en protéine est très élevée, au minimum 50% de protéines. Cependant, on ne peut en consommer que de petites quantités en raison de sa teneur élevée en fer. Pour mémoire, le surdosage en fer est un des mécanismes par lesquels l’excès de viande rouge provoque le cancer recto-colique.

 

On trouve dans le commerce des compléments alimentaires « tout en un » pour végétarien(ne)s, prétendant, en un seul comprimé, répondre à toutes les éventuelles carences. En pratique ces compléments ont souvent une composition aberrante (surdosage inutile de certains nutriments, présence de nutriments non concernés par le risque de carence, absence d’autres nutriments importants,…). En pratique, il est préférable de prendre les compléments nécessaires un par un.

 

Le régime végane, qui exclut absolument tout produit d’origine animale dont les œufs et les produits laitiers  conduit inéluctablement à des carences dans tous les nutriments pré-cités et nécessite un suivi nutritionniste et la prise de compléments alimentaires.

 

Une carence, même modérée, en protéines, fer, magnésium, vitamines B12 et B9, omégas 3, vitamine D, iode et zinc peut faire apparaître ou aggraver une dépression. Cette situation est fréquente chez les jeunes végétarien(nne)s. Avant tout autre mesure, il est essentiel de faire un bilan nutritionnel et de rééquilibrer l’alimentation. Il n’est pas rare que cela suffise à guérir la dépression.

 

* Un jaune d’œuf moyen (de 60g) pèse 20g, il faut donc cinq jaunes d’œufs pour faire 100g.